Invité de la rédaction de louxewtey.com, Ayouba SOW, président de l’association CARIDAD qui est une fondation de bienfaisance est revenu sur les œuvres caritatives de la fondation, les objectifs et le choix de l’association à œuvrer à travers les actes de charité afin de contribuer au niveau de vie des populations de Thiès en particulier et du Sénégal en général. Trouvé dans son fief à Thialy (Thiès), le citoyen du monde, dans un air décontracté, est par ailleurs revenu sur la situation socio-politique et économique du pays. ENTRETIEN.
Vous êtes le président de CARIDAD, une association qui œuvre dans le social, alors pourquoi avez-vous tourné vos activités exclusivement dans le social ?
En fait, je suis né dans le social, ce n’est pas un investissement, c’est quelque chose qui est naturelle. Vous m’avez trouvé aujourd’hui ici dans mon fief à HLM Thialy, là où je suis né où tout a démarré, c’est là où on a passé toute notre enfance et notre jeunesse. J’ai été membre de COSCAS, la cellule qui œuvre pour l’organisation de toute les activités de la tarikha Tidianya, ce qui a aussi beaucoup contribué sur notre penchant à faire du social.
Et après vous avez voyagé en Europe, peut-on savoir en quelle année vous êtes parti ?
J’ai entrepris mon voyage en 2003…
Pourquoi exactement… La situation était compliquée de votre côté et vous avez décidé de chercher un mieux vivre ailleurs ?
Non non … Ce n’était pas difficile, vous savez moi, je suis quelqu’un qui même quand j’étais ici au Sénégal, j’étais bien, j’avais un travail décent qui me permettait de vivre. Mais ma philosophie à moi c’est de ne jamais resté inerte où rester les bras croisés, sinon de toujours chercher à faire quelque chose. Et en ces moment-là c’était l’école, et même si l’école ne finis jamais je continue à apprendre.
Alors comment s’est passé le voyage. Etait-ce par voie irrégulière où vous êtes passé par la voie normale ?
Rires… dans de très bonnes conditions, je suis allé en France pour un regroupement familial, et lorsque je suis parti, je me suis senti vraiment à l’aise et aujourd’hui j’ai fondé une famille et tout se passe bien en France.
M. SOW, parlons de vos activités proprement dites, avec cette remise de dons effectuée au niveau de la croix rouge et qui avait réuni toutes les forces vives de Thiès. Tous les domaines étaient représentés, santé, sport, la jeunesse, tout le monde y a trouvé son compte et même les personnes en situation de handicap, dites-nous concrètement comment avez-vous organisé tout cela ?
Bon, c’est un système qui est devenu très huilé, puisque nous travaillons ainsi depuis l’avènement du COVID. Pour l’activité du vendredi 23 février 2024, on était à notre huitième conteneur. Et d’ailleurs je remercie de passage l’adjoint au préfet de Thiès qui a tenu à faire le déplacement, ainsi que toutes les autorités, de même que toute la presse qui a tenue à venir immortaliser cet évènement. Il faut savoir que tout est parti d’un constat. Avec la précarité qui se passe dans les hôpitaux, quand vous voyagez, vous constatez que l’on doit améliorer beaucoup de choses dans nos structures sanitaires surtout les conditions de prise en charge, c’est pourquoi à mon retour en France, j’ai réuni tous les moyens à ma disposition pour organiser l’expédition de conteneurs pour appuyer les populations à améliorer leur niveau de vie.
Alors qu’est-ce que cela vous fait de voir cet intérêt que les Thiessois portent aux lots de matériels que vous distribuez ?
Un sentiment de satisfaction, l’objectif a été atteint puisque chaque jour nous travaillons pour que nos concitoyens soient dans des conditions de vie satisfaisantes. Vous savez, les activités de CARIDAD sont issues de concertations afin de déceler les besoins des ayants-droits, c’est pourquoi, à chaque fois que nous faisons une activité, elle est portée par les populations.
Vous avez ciblé pour cette activité de remise de dons les personnes en situation de handicap et les enfants de la rue, expliquez-nous pourquoi ?
Cela ne date pas d’aujourd’hui. Si vous le constatez bien depuis l’avènement du COVID, l’association CARIDAD a injecté plus de 800 mille euros donc pour vous dire que ce sont des matériels de bonne qualité que nous amenons. Plus de 400 fauteuils roulants, plus de 700 lits d’hôpitaux et ça c’est un besoin réel. Mais après cela, nous avons constaté le besoin des personnes handicapés en matériel roulant cela nous a permis de contacter les associations de personnes atteintes d’infirmités pour également satisfaire leur besoin. Nous sommes conscients que l’Etat ne peut pas tout faire donc chaque citoyen à le devoir participer au développement de son pays.
Nous restons sur ce sujet avec la question des enfants de la rue, l’Etat a expérimenté plusieurs politiques pour juguler ce problème, mais la question demeure entière. Pourquoi avez-vous réservé la part belle à cette frange faible de la société ?
C’est ce que je disais tantôt, au Sénégal tout est urgence. C’est pourquoi nous au sein de CARIDAD nous parlons de solidarité, santé, Sénégal, c’est autour de ce triptyque que nous travaillons afin constater les besoins réels des populations. C’est pour cela qu’avec ce dernier conteneur nous avons apporté près de 500 pairs de chaussures, des tonnes d’habits pour permettre aux enfants de se couvrir et d’apporter une valeur ajoutée à la politique sociale.
Peut-on savoir le coût global du conteneur que vous avez amené à Thiès récemment ?
Oui, c’est d’une valeur de 50 000 euros (32 500 500 francs CFA) exactement.
Vous avez reçu à Montargis votre ville d’adoption une délégation de l’équipe municipale de la ville de Thiès pour des séances de travail. En tant que facilitateur peut-on espérer un jumelage entre les villes de Thiès et Montargis ?
J’ai une association et je travaille pour Thiès, et ils ont reconnu mon travail et se sont déplacés pour venir me rendre visite et découvrir le travail de l’association, j’ai profité de l’occasion pour tisser des relations entre la ville de Thiès et Montargis, et de là tout est parti et on a essayé de créer des rencontres avec les élus pour une mise en contact et peut-être créer des jumelages et des conventions pour la bonne marche de nos municipalités. Mais cela reste de leur ressort de faire les présentations, à eux maintenant de discuter autour de ce partenariat pour aboutir à du concret.
Vous avez quitté le pays en 2023, alors pour un résident à l’étranger en regardant la situation du pays actuelle, quel tableau vous avez ?
Déçu. Déçu des valeurs que nous véhiculons et qui ne sont pas les nôtres, le Sénégal que j’ai connu ne connaissait pas toutes ces dérives. Ensuite, ce qui est très grave, avec l’avènement de la nouvelle technologie, le Sénégal ne s’est pas préparé, donc à la place d’une utilisation à des fins éducatives, son exploitation tourne malheureusement à la dérive. Et si on voit bien le respect est devenu une denrée très rare. En plus de cela s’ajoute le problème de l’insécurité qui grandit de plus en plus dans nos quartiers et il faut que nos gouvernants y prennent garde pour une libre circulation des personnes.
Actualité politique, vous assistez à tous ces problèmes autour de la présidentielle de 2024 et de l’actualité politique qu’est-ce que cela vous inspire ?
Rires… actualité politique ! pour moi cela sort carrément du cadre de la politique maintenant. Ce que je vois depuis le mois de mars 2021, les choses n’évoluent pas, et pour le développement d’un pays, chaque citoyen doit être le premier acteur à s’investir pour son essor. Depuis trois ans, les gens ne construisent pas mais s’adonnent plus à la destruction de la chose publique. Il nous faut un éveil de conscience, on nous connaissait comme le pays de la « téranga » un nom que porte même mon restaurant en France. Des valeurs que nous avons exporté en Europe pour montrer combien la culture Sénégalaise est belle et humaine, mais hélas aujourd’hui le tableau que nous dépeint les politiques au Sénégal est sombre et cela fait peur car c’est n’est pas une bonne manière de faire la politique. A mon avis, il faudrait que l’on considère davantage les populations, dialoguer avec elle parce que le Sénégal a besoin de paix. D’ailleurs dans son dernier discours, le président Macky a dit « le Sénégal a besoin de pardon », et cela ce n’est pas anodin. C’est pour cela que nous devons tous nous demander mutuellement pardon et retourner vers l’enseignement de nos parents.
Si vous étiez dans la peau d’un conseiller du président de la république, qu’auriez-vous conseillé au chef de l’Etat pour une sortie de crise ?
Dialoguer, rien d’autre que le dialogue. Il ne faut pas que l’on délaisse ce qu’on a de plus valeureux dans ce pays qui est le dialogue « les plus grandes guerres ont fini autour d’une table de négociation » donc le dialogue n’est pas nouveau. Le Sénégal nous appartient tous, et chacun peut apporter sa pierre à l’édifice. Nous appelons dans ce sens les jeunes à un engagement citoyen afin de participer modestement à l’édification d’une société Sénégalaise riche de ses valeurs culturelles et cultuelles et de son patrimoine historique.
Alors revenons à CARIDAD, c’est quoi la prochaine étape de vos activités ?
Amener d’autres conteneurs de matériels à offrir aux populations de Thiès mais aussi celles des autres régions, car pour cette édition nos lots de matériels ont pu toucher des régions comme Kédougou d’autres zones comme Thillogne dans le Fouta ou encore Makkah Village du côté de Tambacounda et avant cela on a fait Khombole, Pout etc. Et sur ce, j’appelle tous les Thiessois mais les Sénégalais d’ici et d’ailleurs à investir davantage dans le pays au niveau des jeunes et des femmes pour un Sénégal fort car Sénégal a besoin de ses fils.
Entretien réalisé par Aïda FALL et Mouhamed Jr DIOP