Quand les populistes arrivent au pouvoir, leurs premières cibles sont les élites et la presse

Un journaliste de la RTS a cru devoir défendre le régime en s’attaquant aux citoyens qui osent porter un regard critique sur les actes que pose celui-ci. Il caricature les débats de l’actualité en parlant d’os à ronger. Donner à quelqu’un un os à ronger signifie l’occuper à débattre de futilités ou de choses non essentielles le temps qu’on s’emploie à faire des choses essentielles. Il oublie que les citoyens ont le droit, voire le devoir, de dire leur opinion sur tout ce que font leurs élus ; que le contre-pouvoir est d’abord exercé par la délibération citoyenne, et qu’il est permanent. Pour ma part, j’accepte volontiers mon statut de rongeur d’os. Mais les chiens n’aboient presque jamais sans raison. Les voleurs et les personnes lugubres qui se dissimulent sous les ténèbres de la nuit morale n’aiment pas les chiens. Laissez-nous aboyer puisque c’est ce que nous avons toujours fait, et c’est ce que ceux que vous prétendez défendre ont toujours fait.

Les problèmes soulevés par les citoyens sénégalais n’ont rien de nouveau. Ce que Sonko a dit sur Macky Sall l’accusant de dérouler un agenda homosexuel est plus injuste, plus faux et plus déloyal que ce que vous tentez si maladroitement de diaboliser. La nomination des généraux a toujours été source de commentaires et même de controverses dans ce pays. Mais peut-être que vous étiez à la RTS dont les micros étaient jetés par terre par Sonko en signe protestation. Vous ne pouviez pas voir que les chiens ont toujours rongé et aboyé. Votre conception de la démocratie n’est pas seulement fausse, elle est dangereuse. Car croire ou suggérer que les critiques et les oppositions à un régime élu à un score fleuve, sont une tentative de l’empêcher de travailler, c’est surréaliste.

Nous parlerons de tous les sujets, mais nous ne nous attaquerons jamais à l’armée ; nous n’insulterons jamais des généraux, nous n’accuserons jamais faussement des chefs militaires d’avoir des immeubles qui coûtent des milliards, nous ne mentirons jamais sur le chef de la police en prétendant qu’il a exilé sa famille aux Etats-Unis. Où sont aujourd’hui les auteurs de ces mensonges ? Ils sont les nouveaux maîtres des journalistes propagandistes qui ont décidé de les sanctifier. Les citoyens qui pensent que la place de général Kandé n’est pas en Inde, ont leur raison, il faut les écouter avec humilité au lieu de faire preuve d’arrogance : même un singe peut être arrogant. Ils peuvent faire erreur, mais c’est leur droit le plus absolu de commenter les actes de leurs autorités, c’est-à-dire leurs serviteurs. Quant au général Kandé, nous dirons simplement ceci : l’élévation et la disgrâce dépendent uniquement de Dieu, restez donc républicain jusqu’au bout !

On voudra souiller une personne bénie de Dieu en employant tous les subterfuges possibles et imaginables, on n’y parviendra pas sans la permission d’Allah. On cherchera à élever un tortueux avec les mêmes subterfuges, on n’y parviendra pas. Mais quand les nuages du mensonge se dissipent progressivement, le peuple sait toujours être reconnaissant. Il lui arrive, sous le charme des populistes et des fascistes, de détester un homme qui ne leur a fait que du bien. C’est ainsi qu’ils prennent les armes contre cet homme aux côtés des fascistes. Mais leur amertume et leur remords sont par la suite tellement grands (quand ils se rendent compte de leur erreur), qu’ils ne peuvent pas s’empêcher de couvrir le héros mal aimé et jadis trahi de louanges et d’admiration : c’est ainsi que naissent toutes les légendes.

On ne peut réparer une injustice sans bonification : dans le monde de la justice, les hommes punis par erreur sont, dans beaucoup de pays, indemnisés. Mais l’histoire des hommes ne connait pas d’indemnisation, elle n’a pas le temps de s’apitoyer sur le sort des individus nous dit Hegel. Néanmoins les hommes qui, à la fois, font et subissent l’histoire, savent récompenser les victimes d’injustice : la légende ! Il n’y a rien de plus grand et plus beau qu’une histoire qui se termine par une légende : c’est l’immortalité assurée et la vie sublimée. Le plus important dans une mission bien faite, c’est le témoignage des hommes avec qui on a accompli ladite mission et celui de ceux au profit desquels on l’a accomplie. Et au regard des relations faites par la presse et des célébrations sur les réseaux sociaux, on peut croire que ce général a marqué beaucoup de monde.

Quant à ceux qui cherchent à imposer des barrières à la liberté de pensée des citoyens, c’est à croire qu’ils ont oublié ce qu’ils sont.  Je commence maintenant à comprendre pourquoi le Sénégal est rempli d’insalubrités : c’est dans nos têtes que l’insalubrité a son siège. L’insalubrité morale est le fondement, la cause et la légitimation de l’insalubrité matérielle. L’insalubrité morale n’est pas la faute, le vice, c’est plutôt cette manie à condamner aujourd’hui ce qu’on bénissait hier, c’est le fait de réussir par le mensonge, la diffamation et la manipulation, pour ensuite s’ériger en censeur dans l’univers de la morale. Ce directeur de la RTS qui propose une régulation des réseaux sociaux veut probablement, comme beaucoup de militants de PASTEF, s’offrir une virginité politique.

Les RS sont effectivement de véritables éboueurs de la pensée et de la morale. Ils sont capables de sortir quelqu’un de l’extrême médiocrité pour le recycler et le propulser au firmament des étoiles qui prétendent réguler la société. Les RS symbolisent la consécration de la médiocrité sur le mérite, l’absolution totale des vices par la force quantitative des likes et des sharings. Mais nous sommes obligés de faire avec, car ils sont la continuation du langage humain, voire de l’homme lui-même.

 

Alassane K KITANE

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